L’aventurière de l’Indiana Perdu (Shadow of the Tomb Raider)

Deux scènes, deux séquences et bien plus de tombeaux disent ce que devrait être Tomb Raider, ce qu’il aurait toujours dû rester. La première se déroule quelques heures après le début du jeu, alors que Lara se souvient de son enfance, de ses jeux et aventures imaginaires dans le jardin terriblement anglais des Croft. La jeune fille, déjà intrépide et audacieuse, se raconte des histoires, des aventures, en résolvant un casse-tête digne des grandes heures de son double PSone. La seconde, c’est cette fin post-générique qui revient sur le passé, sur ce dessin de la jeune aventurière, avec sa famille, avec ce T-Rex emblématique. Des images d’un passé « idyllique » quand le jeu vidéo ne se posait aucune question de cohérence, aucune question autre que technique. C’est donc à une grande boucle que semblait inviter Shadow of the Tomb Raider, à un retour aux sources. Oui, semblait, ce terrible semblait.  

Un journaliste a écrit il y a quelques années que Driver, en laissant son avatar sortir de l’auto, s’était perdu dès son second volet, trahissant son titre, son essence même. Il y a de ça avec Tomb Raider. Dans cet épisode, comme dans le précédent, comme dans tous ceux qui ont brillé (ou pas) sur PlayStation, ce sont les tombeaux qui demeurent les éléments les plus intéressants, les plus amusants, et ce d’autant que chacun à son ambiance, exploite à fond une ou deux idées. En se faisant plus ouvert, en créant un liant plus narratif que jamais entre chaque épisode, Tomb Raider a parfois relégué le plus important, ce qui constitue son nom même, ces tombeaux qui retrouvent ici comme dans le précédent volet leur importance, variant leurs énigmes et leur mise en scène pour se rendre à chaque fois différents, uniques. Là, il y a l’enchantement de la découverte d’un chemin inattendu, la frousse du saut dans le vide, avant que l’on s’accroche in extremis à une corniche. Oui, l’excitation de l’exploration aussi linéaire et maîtrisée par les développeurs soit-elle. Ainsi que le démontre les mini-DLC prévus (des tombeaux avec leurs récompenses spécifiques jouables seuls ou en coopération), l’équipe d’Eidos Montréal a bien intégré cette donnée. Il y a aussi le plaisir du cache-cache – jeu d’enfance par excellence -, comme devenu Predator, Lara se faufile dans les hautes herbes, prépare ses embuscades en se couvrant de boue, élimine un à un les adversaires placés à escient. Chacune de ces séquences est un appel à expérimenter, à essayer à chaque trépas de nouvelles approches. 

Pour autant, à la poursuite d’Indiana Jones, Lara s’est perdue. L’émerveillement est sans cesse brisé par le poids des maux – ceux de l’aventurière, ceux de Paititi -, là où l’ancienne Lara flinguait du tigre, du T-Rex, détruisait des tombeaux pour le plaisir. Oui, presque en rigolant. S’il veut renouer avec cette innocence, avec cette insouciance vidéoludique, Shadow of the Tomb Raider est encore trop engoncé dans la noirceur du reboot là où ses concurrents, là où toutes ses inspirations, Nathan et Indiana en tête jouent successivement sur plusieurs tableaux, de l’aventure, oui, des enjeux, oui, mais aussi une distance, un second degré, une ironie qui manque terriblement à cet épisode où tout est sombre, sans nuance. Comme une crise d’adolescence, cette trilogie reboot. Devenue enfin adulte, Lara pourra-t-elle à nouveau s’émerveiller, et continuer d’explorer ces tombeaux ? Parce que l’on ne rêve que de cela pour Tomb Raider, de tombeaux, de donjons, de pièges vicieux, de trésors fabuleux… Le scénario, le prétexte ? A la poubelle ! Emerveillez-nous par votre level design, par vos mécaniques fabuleuses !

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